Parutions
Editions
- Pierre et Jean, précédé de Le Roman, Jacques Perrin (préfacier), rééd., Paris, Pocket, Pocket 1,50 euros, octobre 2006, 186 p. (1,50 euros)
- Boule de suif, suivie de Mademoiselle Fifi, Paris, Pocket, Pocket 1,50 euros, octobre 2006, 117 p. (1,50 euros)
- LittératureAdo, coffret de cinq volumes : Le Horla ; Le Tour du monde en 80 jours ; Le Grand Meaulnes ; Le Chien des Baskerville ; Croc-Blanc, Paris, Prisma Presse, Collection Litterado, octobre 2006, 1324 p. (24,95 euros)
Destinés aux 12-15 ans.
Présentation de l’éditeur :
« Dans ce coffret, cinq romans incontournables : récits d'aventures, contes fantastiques, roman policier... Leurs héros mythiques ont fait rêver des générations de lecteurs et restent aujourd'hui encore tout à fait d'actualité. Des dossiers inédits. C'est ce que les bonus GEO-Ado proposent de découvrir : réalisés par des journalistes et avec des adolescents, et recommandés par les professeurs, ils font le lien entre le roman et les grandes questions qu'il aborde. Par exemple, les pirates écument les mers de l'Ile au trésor... mais y a-t-il encore des pirates à l'heure actuelle ? En 1815, le petit Jacquou le croquant devait travailler pour survivre. De nos jours, des enfants subissent-ils encore le même sort ? Le centre de la Terre est un milieu bouillonnant où naissent les volcans : quel est ce phénomène naturel à hauts risques ? Et d'autres bonus. En plus, un résumé de l'œuvre, une biographie de l'auteur, des jeux et des quiz sur l'univers du roman. »
Ouvrages
- Hubert Haddad, Le Nouveau Magasin d’écriture, Paris, Zulma, 2006, 938 p. (30 euros).
Contient un chapitre sur l’incipit chez Maupassant.
Présentation de l’éditeur :
« De l'art de la nouvelle et du conte à celui du roman, du sonnet baroque à la poésie contemporaine, du haïku au genre épistolaire, des cadavres exquis surréalistes aux expérimentations oulipiennes, sillonnant entre Rimbaud, Proust, Emily Brontë, Kafka, Borges, René Daumal, André Hardellet, Karl Kraus et cent autres, cet objet littéraire non identifié débride joyeusement l'imaginaire autant qu'il explore les arcanes de la création littéraire – ou comment trouver un sujet, circonvenir une panne d'inspiration, investir de façon ludique la poésie, le théâtre ou le mot d'esprit, s'adonner aux délices de l'analogie et de la métaphore...
Foisonnant, passionné, érudit et simple, terriblement excitant, le Nouveau Magasin d'écriture est tout à la fois une encyclopédie subjective, un dictionnaire portatif, un bréviaire de style et un réservoir magique d'inspiration – en somme : un véritable manuel d'écriture et de littérature en action, pour tous les fous de littérature. »
Pour lire un avis sur cet ouvrage :
http://www.lafactory.com/Livres/Essais/Le_nouveau_magasin_d'ecriture_-_Hubert_Haddad_200612072524/
- Christian Chelebourg, Le Surnaturel. Poétique et écriture, Paris, Armand Colin, Collection U série Lettres, 2006, 267 p. (24 euros).
Le chapitre VII « Le Monde halluciné » évoque la démence chez Maupassant.
Lire le compte rendu de Sébastien Baudoin sur Fabula.
http://www.fabula.org/revue/document1762.php
Articles
Deux contributions sur Maupassant dans La Pensée du paradoxe. Approche du romantisme, hommage à Michel Crouzet, Fabienne Bercegol et Didier Philippot éd., Paris, Presses Universitaires de Paris-Sorbonne, Mémoire de la critique, 2006, 750 p. (32 euros)
- Louis Forestier, « Drôle de jeu. Réflexions sur le jeu chez Maupassant », p.349-362.
- Mariane Bury, « Maupassant iconoclaste », p.363-373.
http://www.fabula.org/actualites/article16520.php
Matériel audiovisuel
Une vie, livre lu sur CD, Editions Studio de La Croix des Landes, 2006, 7 CD (38 euros)
Evénements
Un manuscrit de Maupassant sur Ebay
Du 1er au 7 décembre dernier, un manuscrit autographe de Maupassant était en vente sur le site Ebay France. Il s’agissait de quatre feuillets d’une dimension de 21 x 24 cm (deux feuillets doubles) signés « Guy de Maupassant », avec un coin rogné. La première page comportait le titre « L’Histoire de France par les « Mots » ». Visiblement, ces feuillets constituaient une chronique intégrée plus tard dans Sur l’eau. Début du texte :
« Chez nous, il suffit d’avoir un peu d’esprit pour gouverner. La bonne humeur tient lieu de génie, un bon mot sacre un homme et le fait grand pour la postérité. Tout le reste importe peu. Le peuple aime ceux qui l’amusent et pardonne à ceux qui le font rire. Un coup d’œil jeté sur le passé de notre patrie nous fera comprendre que la renommée de nos grands hommes n’a jamais été faite que par des mots heureux. Les plus détestables princes sont devenus populaires par des plaisanteries agréables, répétées de siècle en siècle.
Le trône de France est soutenu par des devises de mirliton.
Des mots, des mots, rien que des mots, ironiques ou héroïques, plaisants ou polissons, ces mots surnagent sur notre histoire et la font paraître comparable à un recueil de calembours. »
La mise à prix était de 750 euros. L’objet monté jusqu’à 800 euros a été retiré de la vente. Le vendeur m’a indiqué que ces documents venaient de la succession d’un antiquaire de la région de Beaune (Côte d’Or). Qui sait où a fini ce manuscrit ?
Vente Pierre Bérès
Une vente aux enchères aura lieu le mercredi 13 décembre à l’Hôtel Drouot. Il s’agit de la suite de la vente Pierre Bérès. Parmi les raretés et autres incunables, figurent deux ouvrages de Maupassant :
- lot n°679 : l’exemplaire de La Maison Tellier dédicacé à Zola. Edition originale (Havard, 1881, in-12). Envoi : « A Emile Zola, au maître et à l’ami, son bien dévoué Guy de Maupassant ». Reliure signée De Gruel. Maroquin rouge, fleurs mosaïquées dans un cercle au centre des plats, dos à nerfs orné du même décor, couverture et dos conservés. Estimation : 5000/8000 euros.
- lot n°680 : un exemplaire de Bel-Ami avec envoi à Mme Brun-Chabas. Edition originale du roman (Havard, 1885, in-12). Envoi : « A Madame Brun-Chabas hommage de Bel-Ami lui-même Guy de Maupassant ». Reliure de l’époque. Dos à nerfs de chagrin bleu foncé, tête dorée, non rogné. Provenance : Fernand Vanderem (ex-libris, 1939, n°611). Estimation : 1000/1500 euros.
Les ouvrages sont visibles avant la vente le 12 décembre salle 7 de 11 heures à 18 heures et mercredi 13 de 11 heures à 13 heures. Le catalogue est en ligne :
http://www.bibliorare.com/vente-pierre_beres.htm
http://www.bibliorare.com/vente-pierre-beres12-2006.htm
(Information fournie par Bernard Vassor)
De Maupassant aux Mots-Poissons
Frédéric Weigel, jeune artiste contemporain, a créé des objets d’art pour le moins insolites. A partir de fiches (relevés de citations extraites de Maupassant) trouvées sur le radiateur d’une université en rénovation, il a réalisé sur ce support une série de 1515 dessins autour de Maupassant. Partant d’un jeu de mots, il a produit un « Guide Mots-poissons ». Comme les mots-poissons sont joueurs, ils forment des phrases qui coulent. L’artiste a ainsi tenté de trouver de nouvelles phrases dans les premières en les agrémentant d’un dessin de poisson au crayon de couleur. Il explique sa démarche de la façon suivante : « Cet extrait d'un texte de Suto Yoshiko (linguiste) permettra de la présenter :
« De Maupassant aux Mots-Poissons, il y a une opération de réanimation. Ces feuilles mortes sont redonnées à la vie par le défibrillateur de ses crayons de couleur : il souligne, surligne et encadre pour sauver les fonctions vitales, en barrant et raturant les parties périphériques, et il rajoutait des couleurs de couche à couche, en gribouillant, en traçant, et en tâtonnant... Au cours de l'opération, il observe que les mots commencent à circuler : ils se meuvent en coulant des lignes de textes, vers les marges de cartes, les espaces de jeu. Dans ses jeux de mots qui coulent, nagent des poissons réanimés en couleur. » »
L’ensemble des dessins est visible sur le site suivant :
http://wei.fre.free.fr/weigel-b/maupassant.htm
Maupassant dans l'enseignement secondaire
Maupassant ? Spectacle scolaire
La Compagnie des Transports Imaginaires de Bourges a créé une pièce « Maupassant ? » le 19 mars 1999, à partir de cinq nouvelles de l’auteur : « Apparition », « Le Masque », « Le Diable », « Nos Anglais », « Adieu ». Ces nouvelles, sans lien apparent entre elles, ont été choisies pour montrer les différents aspects de l'écriture de Maupassant : récits fantastiques ou paysans, dramatiques et comiques, avec aussi l'émotion ou la poésie. Dominique Tchoryk, acteur narrateur seul en scène, passe d'un registre à l'autre et d’un personnage à l’autre avec talent. Il domine l'univers qu'il a su créer, en interprétant le rôle d’un aliéné, M. Garnier, enfermé dans un asile et qui tente de s’en échapper. Ses fausses sorties constituent le lien entre les différentes histoires que le patient en pyjama interprète dans son délire : ne se prend-il pas pour le conteur normand ? Cette heure de théâtre donne au public scolaire les clés du jeu théâtral pour faire de lui un public averti. Il se rend compte combien le théâtre n’est pas une question de moyens techniques. Un lit, une chaise, une table, un magnétophone et quelques vêtements banals (un imperméable, une écharpe) suffisent au comédien pour créer des personnages et des univers aussi divers que celui du vieux gommeux Ambroise dansant à l’Elysée-Montmartre dans « Le Masque » ou celui de la vieille garde-malade du « Diable » qui envoie la mourante ad patres. Le corps et la voix de l’acteur se transforment pour le plus grand étonnement et le plaisir du public. Représenté plus de 500 fois, ce montage de récits se déplace dans les établissements scolaires en France et dans les Dom-Tom. La compagnie a reçu l’aval de la commission culturelle de l’Académie d’Orléans-Tours. Les prochaines représentations auront lieu :
- Mardi 18 décembre à 9h45 au Collège Molière de Chennevières sur Marne (94)
- Mercredi 20 décembre à 9h au Lycée Camille Claudel de Soissons (02)
- Jeudi 21 décembre à 8h30 et 10h au Collège de la Voie Chatelaine d’Arcis sur Aube (10) et à 15h au Collège Louis Brignon de Fagnières (51)
Pour lire des commentaires sur le spectacle :
http://sp-maupassant.skyblog.com
Pour tout renseignement :
Compagnie des Transports Imaginaires
19 bis rue Nicolas Leblanc
18000 BOURGES
Tel/fax : 02 48 65 21 51
e-mail : theatrecti@free.fr ou consulter le site de la compagnie
http://membres.lycos.fr/theatrecti/
Boule de Surf, Maupassant sur le Web
Nouveautés sur le site espagnol Guy de Maupassant
José Manuel Ramos, Webmaster du site espagnol « Guy de Maupassant », a récemment fait traduire en espagnol Maupassant le Bel-Ami d’Armand Lanoux. On le trouvera au format pdf (2,47 Mo) dans la section « Novedades » ou en cliquant sur le deuxième lien :
http://www.iesxunqueira1.com/maupassant/Novedades.htm
http://www.iesxunqueira1.com/maupassant/Libros/Maup_el_bel_ami.pdf
Le roman Pierre et Jean [Pierre y Jean] (pdf 605 Ko), et les deux œuvres inachevées L’Angélus [El Angélus] et L’Ame étrangère [El Alma extranjera] en espagnol sont également disponibles au format ht :
http://www.iesxunqueira1.com/maupassant/Libros/Pierre_y_Jean.pdf
http://www.iesxunqueira1.com/maupassant/Relatos/angelus.htm
http://www.iesxunqueira1.com/maupassant/Relatos/alma_extranjera.htm
On peut aussi lire en castillan les discours de Zola lors de l’enterrement de Maupassant et de l’inauguration de son monument au parc Monceau.
http://www.iesxunqueira1.com/maupassant/discursos.htm
Le Webmaster a par ailleurs créé un blog qui regroupe tous les textes et ouvrages traduits en espagnol et que l’internaute peut télécharger librement :
http://guymaupassant.blogspot.com/
Maupassant au Japon
Le site japonais Autour de Maupassant de Kazuhiko Adachi a changé d’adresse. Vous pouvez désormais le consulter en cliquant sur le lien suivant :
http://www.litterature.jp/maupassant/
Même si vous ne maîtrisez pas le japonais, vous y découvrirez des dessins réalisés par le Webmaster qui ne manquent pas d’intérêt.
Extrait vidéo de la pièce Au bord du lit
Le site L’internaute donne la possibilité de visionner 1,25 minutes du spectacle de Frédéric Jacquot, Au bord du lit, pièce de théâtre adaptant des contes de Maupassant.
http://www.linternaute.com/video/week-end/maupassant-au-bord-du-lit/
Mont-Oriol dans la Bibliothèque électronique du Québec
Le roman Mont-Oriol est disponible depuis peu au format pdf (1257 Ko) dans la Bibliothèque électronique du Québec, collection aux Quatre Vents. Jean-Yves Dupuis et les bénévoles qui l’entourent ont en effet saisi et repaginé le texte de ce roman de 1887. Il vient s’ajouter aux autres titres maupassantiens déjà présents dans cette collection. Une excellente initiative.
http://jydupuis.apinc.org/auteurs/Maupassant.htm
Nouveautés sur le site Maupassantiana
Le site Maupassantiana poursuit piano mais sano son expansion. Il propose aux visiteurs :
- un article nécrologique de La Croix, du 8 juillet 1893, dans la partie « Documents » :
Nous remercions M. André Haussy pour avoir saisi et nous avoir transmis cet article.
- le conte « La Patronne », paru dans le Gil Blas du 1er avril 1884.
Merci à M. John Robin Allen pour son aide précieuse.
Histoire du vieux temps
Le 14 février 1887, paraissait la protestation des artistes contre l’érection de la Tour Eiffel. Maupassant considérait la Tour comme « cette haute et maigre pyramide d'échelles de fer, squelette disgracieux et géant, dont la base semble faite pour porter un formidable monument de Cyclopes, et qui avorte en un ridicule et mince profil de cheminée d'usine ». Un article de Raoul Ponchon, extrait du Courrier français du 20 février 1887, est en ligne sur le blog des frères Monnier. En voici un court extrait :
« Muse, dis-moi Besson, Libert et Gavardie
Dont il sied de louer la parole hardie ;
Dis-moi le grand Français, perceur de Panamas,
Et le fils chevelu d'Alexandre Dumas ; […]
Orateurs et savants, écrivains et poètes,
Pascaux et Bossuets, Gambettas et Goètes,
Le rouge Maupassant, Zola, pareil aux dieux,
Dont quelques gais romans sentent un peu les lieux ;
De Goncourt retrouvant des pages conservées ;
Et Wolf, tas monstrueux d'apostumes crevées ;
Et le petit Daudet, sous-bâtard de Zola,
Que le fiel teint en vert comme un gorgonzola […]. »
Pour lire l’ensemble de cet article, cliquer sur le lien suivant :
http://raoulponchon.blogspot.com/2007/10/blog-post_06.html
En lisant
Frank Harris, « Souvenirs sur Guy de Maupassant », dans Ma vie et mes amours, traduit de l'anglais par Madeleine Vernon et Henry-D. Davray, Paris, Gallimard, 1960, p.320-321.
« Je me souviens qu’un soir, où je louais le conte intitulé l’Héritage, il me confirma ce que j’avais pressenti ; la vie de bureau qu’il y décrit fut inspirée par son stage au ministère de la Marine, à son arrivée à Paris. Comme je formulais certaines critiques sur le dénouement, il les approuva et, après un instant de réflexion, il me dit :
– Pourquoi n’écrivez-vous pas de nouvelles ?
– Je ne saurais pas, répliquai-je avec nonchalance. Je préfère la vie à tous ses fac-similés.
– Vous ne seriez pas un critique si sagace, continua-t-il, si vous n’étiez également créateur. Mettez-vous à l’œuvre et, bientôt, nous aurons la joie, à notre tour, de vous critiquer.
– J’y penserai, fut ma réponse, et, à vrai dire, à dater de ce jour sa suggestion me hanta. Mais, avais-je l’étoffe d’un écrivain ? […]
A mesure que je me liais avec Maupassant, j’appréciais davantage ce pur type de Français aimable, à l’humeur joviale, aux idées larges. Sportif, il s’adonnait au canotage et s’enorgueillissait de sa force ; il se montra extrêmement surpris quand il s’aperçut que, grâce à mon précoce entraînement dans les écoles anglaises et à ma vie dans les universités américaines, j’étais plus adroit, sinon plus fort que lui. C'est de ses lèvres que j’entendis pour la première fois ce dicton : « Bon animal, bon homme. » Sa vigueur physique était inouïe et il prétendait pouvoir ramer toute une nuit après une journée de canotage sur la Seine. Les jeux violents l’attiraient, alors même qu’il y avait le dessous. Un matin, sur l’eau, à Argenteuil, il se leva de sa place pour remplacer à son banc un autre rameur ; comme il mettait le pied sur le rebord de la barque, le barreur, pour lui jouer un tour, se pencha du même côté et Maupassant fut projeté à l’eau.
– Je ne pus m’empêcher d’en rire, fit-il gaiement, le coup avait été si bien calculé…
– Aviez-vous au moins un costume de rechange ?
– Ma foi non ! J’ai simplement ramé pour me réchauffer et mes vêtements ont séché sur moi. Dans ce temps-là, je n’attrapais jamais froid. »
(La suite dans le prochain numéro de Maupassantiana)
Octave Mirbeau, La 628-E8, Paris, Charpentier, 1908, p.396-398.
« – Je vais si vous le permettez vous raconter encore une histoire… La dernière fois que je vis Bourget, c’était à Cannes, comme vous devez le penser… Maupassant nous avait invités à déjeuner sur son yacht… En me voyant, attendant, moi aussi, sur la jetée, le canot du Bel-Ami, Bourget ouvrit les bras, s’exclama : « Vous ?... Ah ! que je suis heureux !... Il y a tellement longtemps !... Cela me fait une telle joie de vous revoir !... Toute ma jeunesse ! »… Et il m’embrassa, le cher Bourget… Après quoi : « Vous savez ?... Vous allez être très étonné… Vous verrez un Maupassant transformé… oh ! transformé ! » L’orgueil riait par tous les plis de sa face… Il me confia : « Vous savez ?... Je l’ai enfin amené à la psychologie, oui, mon cher, à la psychologie ! »… C’était, en effet, l’année où le pauvre Maupassant écrivait Notre Cœur, hélas !... Bourget remarqua mon peu d’enthousiasme… Il me le reprocha : « Comment ? fit-il… ce n'est donc pas une chose énorme…, énorme ? » – « Si… si… dis-je… oh ! si ! » – « Mais c'est le plus grand événement de ce temps… Quel malheur que Taine soit mort ! Comme il eût aimé cela ! » Il ajouta : « Ç’a été dur !... Maintenant, Dieu merci, c'est fait !... » Sur le Bel-Ami, nous trouvâmes M. Jacques Normand, M. Henry Baüer, M. Valentin Simond, alors directeur de L’Echo de Paris, et ce bon docteur Cazalis, qui songeait déjà à guérir les rhumatismes aixois par la méthode préraphaélite… Le déjeuner fut morne, morne… Maupassant ne disait pas un mot… Il était si affreusement triste, il nous regardait avec des regards si étranges, si étrangement lointains, que je ne pus m’empêcher de lui demander : « Qu’est-ce que tu as ?... Es-tu malade ? »… Il se décida enfin à répondre : « Non… Je ne suis pas malade… seulement… voilà… tu comprends ?... Hier… tiens !... à la place où tu es, il y avait la princesse de Sagan… là, où est Baüer la comtesse de Pourtalès… Qu’est-ce que tu veux ? » J’étais, en effet, très étonné… mais pas de cet étonnement admiratif que m’avait promis Bourget… Maupassant avait levé ses bras vers le plafond d’acajou verni, puis les avait laissé retomber, avec accablement… Maintenant, le coude sur la table, la tête appuyée sur sa paume, l’œil cerclé de rouge, et déjà tout brouillé par la buée trouble de cette folie qui devait bientôt l’emporter, il répéta,en bredouillant : « Qu’est-ce que tu veux ?... qu’est-ce que tu veux ? »... Puis : « Ces femmes-là… je les adore… parce que, mon vieux, vois-tu ?... elles ont quelque chose que les autres n’ont pas, et qu’avaient nos aïeules… nos chères aïeules… l’amour de l’amour ! » Tous, nous avions le cœur serré, sauf Bourget qui, s’adressant à Maupassant, lui demanda : « Et Notre Cœur ?... Où en êtes-vous ? » Et, comme Maupassant ne répondit pas, faisait un geste vague : « Quel beau titre ! » s’écria Bourget, qui nous prit à témoins… Vous verrez… ce sera le plus merveilleux livre !... Un livre extraordinaire ! » Il eut le courage ou l’inconscience d’appuyer plus lourdement encore : « Il me le doit… car c'est moi qui l’ai amené à la psychologie… N’est-ce pas, Maupassant ?... c'est moi ? Dites que c'est moi ? » Alors, Maupassant hocha la tête, et il se mit à rire, d’un rire pénible qui me fit l’effet d’une sonnerie électrique qui se déclenche… Jamais, rien de si douloureux, de si funèbre… Voilà donc où il en était, ce rude garçon, que, tant de fois, sur les berges de la Seine, bras nus, maillot collant, j’avais vu manier l’aviron avec un si bel entrain de joyeux canotier !... Ce furent d’atroces moments… Je fis tout pour abréger cette angoissante visite. On nous débarqua à Antibes… Bourget voulut, à toutes forces, me reconduire jusqu’au train qui me ramenait à Nice… Comme nous nous quittions, je lui frappai sur l’épaule, et je lui dis : « Ah ! oui !... vous l’avez amené à la psychologie… Il y est, le pauvre bougre… il y est en plein !... Mes compliments, mon cher Bourget… » Depuis, je ne l’appelle plus « mon cher Bourget », ni même « Bourget », je ne l’appelle plus du tout… Car je ne l’ai jamais revu… C'est le général Mercier qui l’a revu… »
Qui sait ?
Dans le but de créer une nouvelle page consacrée aux objets, manifestations et lieux baptisés Guy de Maupassant, vous pouvez m’indiquer les noms de rues, d’établissements scolaires (écoles, collèges, lycées), salons, prix littéraires, etc. portant le nom de l’écrivain normand dans les villes ou pays que vous connaissez. Merci.
Bonnes fêtes de fin d’année à tous et à l’année prochaine !
Noëlle BENHAMOU